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Autoportrait Vernon Blake

 1920-1926

Polymathe, à savoir un homme doué dans de nombreux domaines, tel apparaît le trait majeur de la personnalité d’Edward Vernon Brodie Blake. Issu d’une famille aisée, Blake reçut une éducation soignée. A l’Université, il se passionna pour les sciences physiques, en particulier la cristallographie. Blake s’imposa d’abord comme un penseur et Historien de l’Art. Parmi ses œuvres majeures, citons Relation in Art, ouvrage paru en 1925. En 1927, The Art and Craft of design (L’art et l’artisanat du dessin), confirma l’originalité et la profondeur de son approche théorique.

Les centres d’intérêt de Blake embrassaient un très vaste champ. Polyglotte, il passait pour maîtriser l’usage de quatorze langues étrangères. Ces dons facilitèrent ses innombrables voyages à vélo accomplis en Europe. De fait, Blake est passé à la postérité en tant que sportif de haut niveau, un des précurseurs notamment du cyclotourisme. Par ailleurs il manifesta un réel génie inventif, mettant ainsi au point un système de frein qu’il fit breveter et demeure toujours en usage. L’alpinisme constituait sa seconde passion. Suivant la notice nécrologique parue dans le Times, il aurait été le premier à accomplir en Grande- Bretagne l’ascension de sommets réputés difficiles tel Deep Ghyll.

Par ailleurs, son insatiable curiosité l’amena à aborder plusieurs disciplines artistiques, notamment la sculpture. Au début des années 1920, étant depuis 1911, installé aux Baux avec son épouse et sa fille, il exécuta cinq monuments aux morts pour les communes de Maussane, Saint-Saturnin-les-Avignon, Plan d’Orgon, Eyragues et Lauris. Primitivement, un sixième monument avait été érigé à Chateaurenard. Blake compromit sa santé durant ces travaux et perdit l’usage d’un œil, ayant reçu un éclat de marbre.

Outre ses sculptures, Blake laissa derrière lui une œuvre picturale non négligeable dont le corpus, du moins à notre connaissance, n’a pas été établi. Formé à la Slade School of Fine Art, école d’art dépendant d’University College, vers 1899, Blake se rendit à Paris et fréquenta l’Académie Carrière, créée par le peintre symboliste en 1890.

Le musée Calvet abrite de nombreuses œuvres de Vernon Blake, exécutés suivant des techniques mixes : gouaches, huiles sur toile ou sur carton. Parmi celles-ci, se détachent deux autoportraits, exercice ici d’introspection en non d’autopromotion. Le plus récent n’est pas daté. L’artiste, parfaitement reconnaissable avec ses oreilles décollées et volumineuses, a conservé moustache et, semble-t-il, un bouc. Derrière les lunettes, le regard bleu happe celui du spectateur par son expression réfléchie mais non dénuée d’une certaine sévérité. Un détail nous frappe. L’œil droit paraît réduit à une cavité béante. On ne discerne pas la prunelle. Cet élément nous inclinerait à émettre l’hypothèse d’un portrait tardif, réalisé dans les années 1920, après l’accident lui ayant coûté la perte d’un œil.

Du point de vue stylistique, cette œuvre est un hymne à la couleur. Les aplats de couleur dominés par le vert, imbriqués les uns dans les autres, distribués avec une science consommée, maçonnent avec puissance les méplats et il est tentant d’y reconnaître des réminiscences fauvistes. L’écharpe enserrant le cou et les épaules de Vernon Blake, enchante l’œil par le rouge chatoyant du fond et la richesse décorative de ses motifs géométriques mêlant des jaunes, bleus, verts, adoucis par quelques notes blanches.

Si l’on en croit la notice du Times, Blake considérait la peinture comme « une récréation dans ses travaux d’écriture ». Quoi qu’il en soit, cette gouache livre un témoignage irremplaçable de la fécondité artistique d’une personnalité inclassable, brillante et exigeante.

Odile CAVALIER,

Présentation de l'œuvre

Artiste
Vernon Blake
Date

 1920-1926

Siècle
XXe siècle

Caractéristiques

Matières

Gouache,

33,5cm x 24cm

Données spécifiques

Numéro d'inventaire

2020.0.1

Musée d'accueil
Musée Calvet
Provenance

Legs Mennessier, 1999 à L'institut Calvet