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Rideau ou tenture fragmentaire

 VI siècle après J.-C

Le lien entre architecture et textile est bien illustré par une mosaïque présentant l'entrée du palais de Théodoric le Grand à Saint-Apollinaire-le-Neuf de Ravenne, datée du VI siècle de notre ère.

A côté des divers types de pièces d'habillement retrouvés, les fouilles archéologiques ont livré de nombreux autres textiles destinés, si l'on en juge par leurs formes et leurs dimensions, à l'ameublement des demeures égyptiennes. Ces derniers n'ont cependant pas été découverts sur des sites d'habitation, comme on pourrait le supposer, mais bien dans les nécropoles, à proximité des corps inhumés, où ces tissus, généralement de grande taille, étaient en effet remployés en guise de linceul ou de couverture destinés à envelopper les corps des défunts. 
Les traces archéologiques de leur utilisation première font ainsi défaut, puisque aucun rideau ou aucune tenture n'a encore, à ce jour, été découvert suspendu à un mur d'habitation, Toutefois, il a été possible de déterminer leur usage en recoupant les données matérielles découvertes sur les sites avec des témoignages iconographiques, tels que les mosaïques de même époque, particulièrement bien conservées grâce à la nature même des matériaux utilisés. 

La porte centrale y est obturée par un rideau orné de galons à retour d'équerre, contenant des carrés à décor géométrique. Les autres travées, ménagées par des colonnes, sont parées de rideaux suspendus par des anneaux de tissu à des tringles, et dont le décor se compose d'une bande en partie supérieure et d'un semis d'éléments floraux se détachant sur un fond clair sur l'ensemble de la pièce. 

Ces mêmes fleurs, à huit pétales rouges et au centre jaune d'où jaillissent quatre tiges bleues, se retrouvent sur trois fragments de tissu conservés au musée Calvet (A103A10: cat. 64), Où elles se détachent, toujours en semis, sur un fond de toile de lin écru. L'adéquation entre source iconographique et témoignage archéologique est ici parfaite, et laisse supposer que les trois fragments dont nous disposons constituaient autrefois un rideau, ou un ensemble de rideaux. 
Ceux-ci peuvent en outre être rapprochés d'une tenture conservée au musée du Louvre, sur laquelle nous retrouvons ces mêmes fleurs plurilobées disposées en semis, au milieu cette fois d'oiseaux orientés vers la gauche et d'une corbeille de fleurs, tandis qu'en partie supérieure une bande de tapisserie a été conservée, similaire à celle représentée sur la mosaïque de Ravenne. Cette tenture proviendrait, comme nous le supposons également pour les trois pièces du musée Calvet, d'Antinoé et des fouilles d'Albert Gayet. Elle est datée entre le XVIIè et le VIIè siècle: trois fragments de rideaux.
 
À en juger par ses dimensions importantes et par la répartition des éléments décoratifs, la fonction de tissu d'ameublement de la seconde pièce (A 103 A;cat.65) ne semble pas non plus faire de doute. Ce textile, de forme rectangulaire, présente encore deux lisières sens chaine. ce qui indique que nous disposons ici de la largeur totale de la pièce, tandis que sa hauteur ne peut être que supposée. Sur un fond en toile de lin écru, des éléments de décor en tapisserie ont été confectionnés au fur et à mesure du tissage. 
Ceux-ci se composent d'une bande cernée par des bordures en pointes de triangle et contenant une frise de médaillons, ornés en leur centre de fleurs plurilobées multicolores. A intervalles réguliers, de petits médaillons ornés de bustes stylisés aux couleurs variables sont suspendus par un trait noir à cette bande, tandis que des motifs végétaux stylisés rouge et vert parsèment ponctuellement le fond de la toile de lin. 

Cette organisation du décor tapissé se rapproche de celle d'un rideau du VIIè siècle conservé aux Musées royaux d'Art et d'Histoire de Bruxelles, sur lequel nous retrouvons une bande placée en partie supérieure, à laquelle sont suspendues alternativement des fleurs plurilobées et des corbeilles de fruits. Sur cette pièce, un système d'accroche a pu être conservé. ll s'agit d'une sorte de cordelette ou de lien en lin, pris dans le tissage de la toile de fond et formant une boucle dans laquelle devait passer la tringle destinée à supporter le rideau. Sur le tissu du musée Calvet, aucun système de ce type n'est conservé. Toutefois, en raison de la similitude entre ces deux pièces, il semble parfaitement envisageable que celui-ci en ait été doté à l'origine, afin d'être suspendu dans un intérieur. 

La position des bustes se révèle alors inattendue et surprenante, puisque, une fois suspendus, ceux-ci se retrouvaient inévitablement la tête en bas. Peut-être s'agit-il ici d'un trait d d'humour de la part des tisserands, dont les témoignages ne manquent pas sur les textiles. A moins que nous ne nous trouvions en présence d'une erreur de tissage, le tisserand ayant commencé par la bande à frise de médaillons, avant de poursuivre son travail sur les bustes en omettant leur destination finale, et en les traitant suivant son propre sens de lecture sur le métier.

 A. M. 

Présentation de l'œuvre

Date

 VI siècle après J.-C

Lieu

Probablement Antinoë

Caractéristiques

Matières

Toile de lin écru ; tapisserie de lin écru et laine brune, rouge, jaune, orange et verte

 H. 93 ; L.145 cm Bandes :H.7 cm  « Gouttes »H.8,5 cm 

Données spécifiques

Numéro d'inventaire

A 103 A

Musée d'accueil
Musée Lapidaire
Provenance

Don Clot-Bey à L'institut Calvet en 1846

Bibliographie et expositions

Bibliographie