Sainte Anne Trinitaire
1475-1480
Les dimensions et le cintre, les motifs poinçonnés dans l'or des auréoles et le long du cadre, la couche picturale fine et lisse laissant transparaître par endroits le dessin préparatoire, la gamme et la vivacité des couleurs. A n'en pas douter, ce panneaux est sorti des mains d'un même peintre, et faisaient partie d'un même ensemble aujourd'hui démembré, sans doute un triptyque duquel sainte Anne Trinitaire formait le centre, et saint Jérôme (inv : 23538) le volet droit.
Le regroupement sur une même image de l'Enfant Jésus et des deux générations de son ascendance maternelle, au XV siècle, est surtout répandu dans les régions flamandes et germa niques. Des différentes formes que peut prendre ce groupement, I ‘Italie ne connait que la plus allégorique, défalquée de l'iconographie de la Trinité dite “trône de grâce" : la position assise et enveloppante d'Anne correspond à celle du Père, le Christ est au premier plan de l'image, les trois figures, frontales, se superposent verticalement.
L ‘une des plus anciennes représentations florentines de ce thème, peinte par Masaccio et Masolino pour l'église Sant Ambrogio vers 1425, conserve l'emboitement des deux figures féminines assises I'une devant l'autre, mais décale de I ‘axe médian I ‘Enfant Jésus, rendant plausibles les positions respectives.
L'auteur du panneau Puech partage ce souci de vraisemblance ; mise en valeur par l'importance de son trône et par l'ampleur des plis de son manteau, Anne domine la Vierge, assise devant elle sur un siège non visible, et pose ses deux mains sur ses épaules. L'Enfant dort, allongé en travers des genoux de sa mère, perpendiculairement à l'axe vertical traditionnel, mais les mains levées de Marie renforcent celui-ci.
Le sommeil de I ‘Enfant est un motif fréquent à Venise et le long de la côte adriatique. Dans le sud de cette zone, le peintre pourrait avoir vu des œuvres de Piero Della Francesca : il lui emprunte la géométrisation des formes (sensible sur le personnage de la Vierge : visage ovale, sourcils arqués, cou ombré comme un fût de colonne, plis tubulaires de la robe), des effets de symétrie, et certaines attitudes (les paupières baissées de Marie, sa façon de joindre les mains sans même qu'elles se touchent comme le Christ du Baptême de Londres, I ‘Enfant appuyé sur son bras replié comme sur le retable de Brera réalisé à Urbino).
Quelques points communs (Anne tenant sa fille aux épaules, Enfant couché horizontalement), issus peut-être d'un même modèle, entre la sainte Anne Trinitaire d'Avignon et celle - plus fruste - provenant de San Francesco de Gualdo, pourraient renforcer l'hypothèse d'un séjour dans les Marches ou le nord de l'Ombrie du peintre des deux panneaux Puech. La tonalité plus vénitienne et mantouane du Saint Jérôme se trouve ainsi nuancée, et enrichie la culture artistique du peintre.
M.-C. L.
Présentation de l'œuvre
1475-1480
Italie, région de l'Adriatique
Caractéristiques
Peinture sur bois
H. 1,01 :;L. 0,50
Données spécifiques
23537
Donation Marcel Puech à l'Institut Calvet
Bibliographie et expositions
Marcel Puech. Une vie, un don. Chefs-d'oeuvre de la donation Marcel Puech
Foissy-Aufrère, Marie-Paule. Avignon, 1995