Saint Paul

La date portée par le tableau correspond aux années où l'artiste, momentanément libéré des problèmes d'argent qui avaient empoisonné les premiers temps de son séjour à Rome, se marie et acquiert une clientèle stable en particulier chez les Anglais (Michel O. 1996). D'autres tableaux à sujet religieux datent de la même période, comme L’adoration des mages du musée de Fécamp. 
Dans ce Saint Paul, ce n’est pas tant le visage qui est caractérisé que le sentiment qui anime le personnage. Les sourcils hérissés, le regard oblique et farouche, la main triturant les abondantes boucles de la barbe, tout est calculé pour rendre sensible la passion concentrée de l'apôtre. Une habile distribution de la lumière attire l'attention sur le grand front déjà amplement dégarni et la fermeté noueuse de la main qui serre l'épée. 
La source de Blanchet est évidente : c'est le Moïse du tombeau de Jules II, à San Pietro in Vincoli, à Rome (1513-1515). Jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, Michel-Ange a été plus vénéré que copié par les artistes comme par les architectes. Ses audaces formelles et son esprit farouche s'accordaient mal avec la galanterie rococo. Que Gabriel Blanchet l'ait pris comme modèle illustre son caractère indocile et sa résistance aux conventions de son temps.